• Le psy comportementaliste égal à lui-même:

    - Alors on sort la tête de l'eau?

    - Oui un peu, j'ai encore de grands moments de tristesse, il n'y a pas de jours ou je ne pleure pas.

    - Et que faites vous dans ces moments là?

    - Je laisse aller.

    - C'est sans doute une bonne solution.

    - Mais je suis fatiguée, il y a beaucoup de formalités administratives, cela me prend du temps et je navigue entre fatigue, énervement et tristesse.

    - Mais personne d'autre ne peut les faire?

    - Mais non il n'y a que moi, mon père était remarié sous régime de séparation de biens, ma belle mère n'avait pas de procuration sur son compte et ils n'avaient pas de compte joint.

    - Ok

    - Je rêve de mon père mais je ne fais pas de cauchemars.

    - Ah vous voyez quand vous n'êtes plus dans les non-dits, les secrets de famille.

    - Oui et cela fait deux ou trois nuits que je dors mieux sans reprendre de Seresta pendant la nuit. Par contre vous m'aviez dit 5 gouttes de Tercian mais après des nuits blanches je suis remontée à 10. 

    - N'allez pas trop vite. Quels sont vos objectifs?

    - Le premier et c'est ce qui m'angoisse le plus c'est d'arrêter mon travail, je ne peux plus.

    - Et bien vous arrêtez.

    - Oui mais il faut deux mois de préavis et je dois reprendre la petite.

    - Eh bien reprenez deux mois.

    - Je ne m'en sens pas capable.

    - Il faudra toujours la reprendre.

    - Non aux vacances elle ne sera plus placée, le contrat sera rompu.

    - Quelle solution avez-vous?

    - Je pensais à un arrêt de travail!

    - Mais jusqu'en juin? si on était en Avril encore!

    - Je pensais à un arrêt longue durée, cela fait déjà 2 mois que je suis en arrêt.

    - Voyez ça avec votre médecin traitant.

    - Oui ça m'inquiète tout ça.

    - Vous ne parlez pas bien avec lui?

    - Si, mais il n'y a pas longtemps que je le connais le Dr P., je ne sais pas trop.

    - Allez le voir.

    - Oui s'il hésite il peut vous appeler?

    - Oui bien sur pas de problème.

    - Oui parce que je sens bien que quand je ne suis plus dans la contrainte et que je vais à mon rythme, je suis bien mieux surtout le matin. Et l'après midi recevoir cette petite qui a des problèmes je ne m'en sens plus la force.

    - Bien sur.

    - Sinon j'aurais bien diminué progressivement mon traitement pour pouvoir l'arrêter mais je sais bien qu'il ne faut pas aller trop vite, j'ai des moments très durs encore.

    - Et avec votre belle-mère?

    - Ça va, ça se passe bien, mais jeudi elle est venue avec ma nièce et ma belle sœur et elles ont beaucoup parlé de la maladie, de la mort de mon père et des derniers jours que je n'ai pas vécus.

    - Bon c'est fait.

    - Oui mais dimanche c'est la messe de huitaine et ma belle mère nous a invités à déjeuner cela va recommencer.

    - Mais vous avez une action là-dessus, vous laissez dire au début du repas puis après vous dites, et si on parlait d'autre chose?

    - Ce n'est pas facile, ma belle mère prend beaucoup de place, elle parle beaucoup.

    - Là vous pouvez changer le cours des choses.

    - Mais moi aussi je ne peux pas m'empêcher de parler des choses douloureuses, hier soir je recevais des amies, mon mari travaillait de nuit. Je pensais me changer les idées mais j'y revenais sans cesse.

    - Oui alors là il va falloir vous dire qu'il y a des endroits pour cela et qu'en dehors vous êtes dans la vie.

    Silence

    - A quoi vous pensez?

    - Je pense que demain dans la maison de mon père, là nous vivions à quatre, nous serons chez une étrangère, il n'y a que moi qui reste de cette famille.

    - Mais c'est un moyen de rester la petite fille que vous étiez à ce moment là et non pas la femme adulte qui a un repas en famille et c'est tout.

    - Jeudi soir j'étais seule, mon mari était de nuit, et je me disais qu'ils devaient être heureux tous les trois là-haut et que moi je restais toute seule.

    - Mais c'est comme si vous regrettiez d'avoir tenu le coup vous, eux n'ont pas tenu et que vous projetiez dans un avenir proche de les rejoindre, qu'il ne fallait que cela pour être heureuse.

    - Non pourtant c'est juste un moment de tristesse, je me réjouis d'avoir mon mari et mes enfants.

    - Et qu'avez-vous fait de positif depuis 15 jours?

    - Eh bien j'ai réservé un séjour à Belle-île la semaine d'avant la Toussaint pour nous deux.

    - Bien, très bien et c'est une bonne chose.

    - Cela dépend des jours je suis plus ou moins bien, ça dépend beaucoup des visites que j'ai ou des appels téléphoniques, ma belle sœur par exemple ramène toujours des vieux souvenirs.

    - Et que faites-vous par rapport aux souvenirs?

    - Eh bien je n'aime pas que l'on m'en parle, et les miens je voudrais les extirper.

    - OK

    - Sinon je sais que j'ai pardonné et que grâce à cela mes parents et mon frère doivent être heureux. Et je suis contente de l'avoir fait je me dis que maintenant ils peuvent m'aider.

    - Hum, hum.

    - Mais j'ai quand même fait un cauchemar; Mon oncle, le plus jeune frère de ma mère se collait derrière moi et j'étais très gênée. Cela confirme, je n'en ai jamais parlé ici, quand j'étais très jeune il m'embrassait pour me dire bonjour mais pas normalement et ma mère le rouspétait. Le souvenir m'est revenu l'année dernière au moment des autres souvenirs.

    - Hum, hum.

    - Je voudrais me débarrasser de tous ces souvenirs là, la vie avec ma mère aussi parce que je n'en ai jamais beaucoup parlé. Pour le viol de mon frère ça va maintenant je me sens à distance alors je voudrais que ce soit pareil pour le reste.

    Dans toutes les démarches, j'ai aussi vu le médecin de mon père pour lui parler de lui et de tous nos échanges. Je voulais aussi savoir s'il se confiait à lui, il lui avait parlé de la mort.

    - Bien, on va s'arrêter là, vous savez que je suis absent un moment?

    - Oui

    - On se voit la semaine prochaine?

    - Non dans un mois.

    - Ok, si vous avez des problèmes vous voyez votre médecin traitant. Et dans un mois tout tranquillement les choses seront adoucies, apaisées.

    Je repars complètement sonnée mais je pense que c'est une bonne séance, il me faut juste le temps de digérer et d'élaborer!


     


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  • Comme c'est compliqué de trouver le sommeil dans ces temps très douloureux, le changement de traitement n'a rien amélioré du tout. Il y a beaucoup de formalités à faire, ma belle mère étant incapable et je fais participer ma nièce mais elle n'est pas d'une grande aide. Deux banques, la mairie du lieu du décès, le notaire, l'hôpital ou était mon père pour payer les factures.

    Je me rends à ma demande chez le médecin de mon père, je lui offre le poème brésilien qu'il ne connaissait pas, pourtant chrétien pratiquant. Je lui dis qu'il s'est passé beaucoup de choses avec mon père le mois dernier et je raconte les échanges via la personne de JALMALV. Du coup je raconte mon histoire afin de savoir si mon père avait pu décharger ses angoisses en se confiant à son généraliste, eh non il ne savait pas, j'ajoute que cela a du être très dur pour lui de garder cela pour lui tout seul. Il est d'accord et dit que cela a du l'apaiser de m'en avoir reparlé le mois dernier. Et je lui dis mon inquiétude après avoir raconté mon histoire à mon père alors qu'il avait déjà son cancer de la prostate, je demande si son état ne s'est pas aggravé (métastases osseuses) après le choc que je lui ai asséné. Il me rassure tout de suite, disant que les métastases étaient là bien avant et qu'il avait surement un autre cancer qui évoluait à petit feu. Et il ajoute que c'est bien de lui en avoir parlé pour lui comme pour moi. J'ai partagé ma dépression, ma thérapie j'avais envie de le faire et il me remercie plusieurs fois. Je dis que j'ai rassuré mon père les derniers temps sur ma santé psychologique et lui demande si mon père avait parlé de la mort, il dit oui il lui avait dit qu'il savait qu'il allait mourir et qu'il avait peur. Pour m'excuser je dis que j'ai surement été en colère pendant sa maladie mais que j'avais eu du mal à accepter le diagnostic, il répond que c'est une phase normale. J'ajoute que mon père était très distant sauf pendant les dernières semaines et que mon fils me disait: maman en un mois tu as rattrapé toute ta vie avec ton père.

    Je le remercie infiniment pour tout et pour les soins apportés à mon père, il me remercie également et est content d'avoir appris tout cela. Il ne voulait pas que je le règle mais j'ai insisté et l'ai payé il m'a fait une feuille. Je trouve normal de payer il a donné de son temps ( au moins 30 minutes).

    Je repars remplie d'émotions, je pleure beaucoup mais me sens libérée.

    Épuisée le lendemain je me décide à réserver quelque chose pour partir 3-4 jours avec mon mari. Ce sera à Belle-île en mer un endroit ou je ne voulais pas aller car c'est là que mon frère s'est tué, mais bon 20 ans sont passés. Cela va me faire du bien car entre les courriers administratifs, les démarches et les appels téléphoniques de sympathie ou je répète toujours la même chose, je suis terriblement épuisée et pourtant je commence à mieux dormir.

    Cependant j'ai des pensées pas très joyeuses me disant; mes parents et mon frère doivent être heureux tous ensemble et moi je reste seule mais sans doute qu'ils m'aident.


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